Paris sous la pluie !
Du 10 au 16 mars
Lundi 10 mars - La Sainte Chapelle
Devant l’entrée de la Sainte Chapelle s’amasse une foule compacte de touristes dont un grand nombre est japonais. Je prends place parmi eux et attends. Pour me distraire, je lis le panneau devant moi où il est écrit : « Pour aller plus vite, réservez votre billet. »… Je souris… Sur mon billet il était indiqué une heure de passage à 15h30… Vers 16h30, la file dans laquelle je suis est autorisée à entrer… Heureusement, il ne pleut pas ! Je pénètre dans la salle du bas et admire le bleu du plafond orné de lys.
Royal !
En suivant le flot de touristes, je gravis un escalier de quelques marches qui débouche sur la salle du haut… Je reste bouche bée ! C’est splendide ! Les vitraux s’élancent à une hauteur vertigineuse. J’ai l’impression d’être dans le ciel ! Voilà une réalisation qui exprime l’idée de plus grand que soi ! D’infini et d’illimité ! J’aimerais être seule dans cette chapelle pour m’y recueillir… Je crois que je monterais au ciel tout de suite !
La Conciergerie
Après avoir fait le tour de la Sainte Chapelle, je me dirige vers la Conciergerie. Une autre ambiance m’attend et le contraste est fort… J’étais dans le ciel, me voici dans l’enfer de la prison et de la Révolution Française ! Les somptueux vitraux sont remplacés par des voûtes en pierre blanche. Dans les étages, des panneaux narrent l’histoire de la Révolution et surtout, de la Terreur. Une période qui porte bien son nom !
Je lis les témoignages suivants :
« Bientôt je fus séparé de mes compagnons et plongé, sous le nom de secret, dans le cachot le plus infect de la maison ; j’y trouvais des voleurs et un assassin condamné à mort… Nous étions absolument privés de clarté. L’air était méphitique, la malpropretés, le plus grand des fléaux, nous recouvrait, pour ainsi dire, de nos propres immondices. Elles refluait jusqu’à nous dans un terrain de douze pieds, et où nous avons été entassés souvent sept à la fois.
Mémoire d’Honoré Jean Riouffe, arrêté et emprisonné à la Conciergerie de l’automne 1793 à l’été 1794 pour raisons politiques.
« Non rien ne peut se comparer
À la sombre Conciergerie
Le soleil craint de pénétrer
La grille de barreaux garnie
Mais demain on me jugera
On fixera ma destinée
Et le tribunal m’ouvrira la porte… Ou la croisée (bis). »
Chanson faite à la Conciergerie par le citoyen M… âgé de 17 ans et demi la veille de son jugement, vers 1793.
Bouleversant.
La Salle des Noms
Sur les murs de cette salle sont inscrits les noms de plus de 4000 personnes qui ont été jugées par le Tribunal révolutionnaire entre 1793 et 1795. Qu’elles étaient exécutées, acquittées au condamnées à d’autres peines, elles ont toutes en commun d’avoir passé au moins quelques jours à la Conciergerie.
Inévitablement, je pense au Mur des Noms de Jérusalem où sont inscrits 76 000 juifs, dont 11 400 enfants, déportés de France pendant la Seconde Guerre mondiale. Liberté, égalité, fraternité dit-on ?… Pas toujours.
La Terreur
Un buste de Robespierre était exposé montrant un homme au regard inquiet. J’ai relevé quelques phrases citées à côté de cette représentation de l’homme. Les voici :
« La vertu, sans laquelle la terreur est funeste ; la terreur sans laquelle la vertu est impuissante. »
« Je vous laisse ma mémoire, elle vous sera chère et vous la défendrez ».
Finalement, celui qui a participé à tuer des centaines de personnes, sera lui aussi guillotiné et passera par la Conciergerie. Devant ce buste, je m’interroge…
Comment peut-on espérer changer le monde dans un bain de sang ? Bien sûr, me répond Robespierre… Il fallait en passer par là pour accéder à la démocratie et à la liberté dont tu profites aujourd’hui ! Je lui demande s’il pense avoir fait mieux que le pouvoir qu’il a voulu renverser ? D’un ton sec, il me dit qu’il s’agissait d’une nécessité, que ça ne devait pas durer.
À côté des citations de Robespierre, se trouve une phrase de Danton : « Soyons terribles pour éviter au peuple de l’être »… En la lisant, je me dis que ces hommes étaient complètement fous ! Mais notre histoire récente-a-t-elle fait mieux ?
Si je mourrais de faim n’aurais-je pas les même idées ?
Des femmes révolutionnaires
À la fin de la visite, en traversant la cour de la Conciergerie pour regagner la rue, des panneaux présentent des femmes qui ont marqué l’époque de la Révolution par leur engagement politique et personnel.
Voici ce qu’elles ont dit, en commençant par une citation de Lucile Desmoulins qui a été guillotinée quelques jours après son mari, Camille Desmoulins, considéré comme l’une des figures majeures de cette période.
J’ai souvent entendu dire que les femmes sont plus douces que les hommes, plus patientes… Moins promptes au conflit… Je crois qu’en tant qu’humain, nous sommes tous capables de colère, de haine, de désir de vengeance et de cruauté. Pourquoi cela serait-il acceptable et accepté venant d’un homme et tout à fait inconvenant et surprenant venant d’une femme ? Cette vision d’une nature douce et conciliante accordée aux femmes serait-elle liée à la maternité ? Le stéréotype qui veut qu’une mère soit patioente et consolante alors qu’un père incarne l’autorité est-il fondé sur la réalité de leur nature profonde ?
Il y a quelques années, j’avais lu une étude sur les comportements des femmes lorsqu’elles sont en présence d’un homme dans un groupe. Je retiens de cet article un constat qui m’avait marquée… Il disait que les femmes ont une plus grande liberté de parole lorsqu’elles sont entre elles. Dès qu’un homme s’introduit dans le groupe, elles adoptent un comportement plus discrets et s’expriment moins franchement. Elles laissent ainsi tout l’espace à l’homme dont la parole fait alors autorité.
À méditer…
Paris Pastel
Ce matin, des nuages gris perle s’enroulent autour de la Tour Eiffel. Je souris… Quand j’étais enfant, j’avais une petite toile représentant un quartier de Paris sous la pluie… J’ai passé des heures à me promener dans cette rue dont les devantures illuminées des magasins se reflétaient sur la chaussée luisante d‘eau. C’était beau !
Je me disais qu’à Paris, il y a toujours une lumière allumée quelque part et quelqu’un qui rentre chez lui pour se mettre au chaud. Il me semblait qu’avec tous ces gens derrière ces milliers de fenêtres, il était impossible de se sentir seul. Il suffisait de sortir pour voir l’humanité se déployer sous nos yeux, entendre toutes les langues du monde et découvrir les cultures les plus lointaines ! Quelle merveille toute cette vie ! C’est là-bas que je voulais être, dans la rue illuminée de mon tableau !
Aujourd’hui, Paris sous la pluie est réelle. Qu’il est bon de vivre ses rêves ! Je me répare ! Je me cicatrise… Merci.
En rentrant à l’appartement, je pose mes affaires et je m’assois sur la terrasse. La pluie a amené avec elle des couleurs pastel qui baignent la ville de douceur sous la lumière argentée de la lune qui apparaît dans le ciel.
Je me sens en paix… Quel bonheur d’être ici ! C’est une bénédiction.
Mardi 11 mars- Mon 16ème…
Je descends l’Avenue Henri Martin jusqu’au Trocadéro. C’est un bonheur de contempler la beauté des façades, d’imaginer le secret d’une intimité qui se devine dans l’encadrement d’une fenêtre… J’aime les larges trottoirs et les gens que je croise… Ceux qui promènent leurs chiens, font un footing, qui téléphonent… Et puis, ces dames âgées, certaines vêtues de manteaux de fourrure, qui avancent à petits pas, souvent les yeux baissés...
Elles sont l’âme du 16e arrondissement… Elles incarnent cette élégance intemporelle et raffinée qui émane de ce quartier. J’ai une tendresse particulière pour vous Mesdames car vous me rappelez ma mère et ma grand-mère…
J’aime votre 16e arrondissement qui, au fil des jours devient un peu le mien. Merci de me faire une place parmi vous, dans ces immeubles confortables où il fait bon se réfugier loin du bruit et de l’agitation de la capitale.
La nuit tombe et le 16ème se pare de lumières dorées… Magique !
Place du Trocadéro by Night
En arrivant au bout de l’avenue Henri Martin, j’entends des sifflets et des bruits de motos. Je me dis qu’il y a peut-être une manifestation… En effet, en arrivant sur la place, je constate une certaine agitation. Je vois des policiers et des militaires… L’accès au Jardin du Trocadéro est barrée de même que l’entrée du métro… Je demande à un policier ce qu’il se passe. Il me répond que le Président était là pour une réunion avec les chefs des armées…
Cette information suscite en moi des questions… Qui est Emmanuel Macron ? Qui sont ces chefs des armées ? Pourquoi devient-on président de la république ou chef des armées ? Pour le bien de la population ou pour son ambition propre, pour faire la guerre ou pour faire la paix ? En prenant leurs fonctions savent-ils qu’ils peuvent être amenés à tuer des gens un jour ? Peut-on dormir en paix quand on sait qu’on tue des gens ?
Et moi, qui ne suis ni présidente, ni cheffe des armées, n’ai-je pas une responsabilité dans le fait que des gens soient tués au nom de la France sur cette planète ?
Pendant que je me promène à Paris, que se passe-t-il à Kiev ?
Prières…
En arrivant au Sacré-Cœur, j’allume une bougie comme je le faisais avec ma grand-mère paternelle et avec ma grande tante maternelle…
Mamie Jeanine et Sosso, vous êtes avec moi chaque fois que j’allume une bougie dans une église. Je sens votre présence à mes côtés et vos mains chaudes qui se glissent dans la mienne. Je sais que vous dites chaque mot de ma prière avec moi. Et je sais que ces prières-là ont force immense grâce à vos présences. Je pense à mon parcours…
En 2022, j’ai prié pour que ma mère guérisse du cancer. En 2023, j’ai prié pour avoir une révélation. En 2024, j’ai prié pour être libérée. En 2025, je prie pour être en paix.
Seigneur donne-moi ta Paix !
Le Sacré-Cœur
Après avoir fait le tour de l’église, j’attends mon tour sur le banc des confessions. J’éprouve le besoin de parler à un prêtre. Il faut que je lui dise quelque chose…
Comme souvent, je sors de la confession l’esprit en paix. La réponse que m’a fait le prêtre à la lumière de la Bible et du parcours de Jésus m’est précieuse. Elle me permet de savoir immédiatement si je me trompe ou si je suis sur la bonne voie. Là, je suis sur la bonne voie. Tout va bien… Je m’allège… Je respire…
Je prends place dans la nef pour assister au dernier office du jour. Là, j’ai le temps de contempler la grâce nue de cette église. J’apprécie l’atmosphère de recueillement qui règne ici, loin du défilé incessant de touristes de Notre-Dame ! Une Soeur distribue les feuillets pour l’office. Je suis ravie de la voir !
Je pense à l’abbaye Sainte Scholastique à Dourgne. Chères Sœurs, vous me manquez ! J’aime être avec vous ! J’aime vos conversations et le rythme de vos vies. Dieu est présent dans chacun de vos gestes et c’est une bénédiction pour moi. De toute mon âme, je vous remercie de m’accueillir parmi vous.
De toute mon âme je remercie les sœurs du monde entier de prier pour nous.
Montmartre by Night
Après l’office, je pensais assister à la messe mais je viens de me rendre compte que la bouteille d’eau qui se trouvait dans mon sac à dos a fui… Elle a dégouliné sur mon pantalon ! Je sens le tissu humide qui se colle à ma peau !
En descendant la butte jusqu’au métro, je prends des photos de Montmartre. Après les températures printanières que nous avons eu la semaine dernière, le froid est de retour… Je prends quand même quelques instants pour contempler la vue panoramique qui s’offre à moi… J’ai l’impression d’être un oiseau qui vole au-dessus de Paris !
À la tombée du jour, Paris montre un autre visage. J’aime cette animation dans les rues qui s’éteint peu à peu au fil de la nuit. Cela me fait l’effet des histoires que l’on me racontait avant de m’endormir quand j’étais enfant…
Bonne nuit Paris !
Mercredi 12 mars - L’église de la Madeleine
En sortant du métro, je remonte la rue Auber au bout de laquelle j’entrevois l’église de la Madeleine. Pour atteindre l’entrée, j’en fais le tour et suis ravie de constater que les colonnes noircies à l’arrière, font place à une façade nettoyée, à l’avant. Je me promène un l’instant au milieu des imposantes colonnes qui me rappellent celles de la Grèce Antique que j’avais vues à Athènes quand j’étais enfant.
Il est 18h et un concert vient d’avoir lieu. Les musiciens et le public sortent en discutant joyeusement. Le personnel qui s’occupe de l’organisation range le matériel à grand bruit. Notamment, en faisant traîner les chaises sur le sol. Je trouve intéressant que les églises soient aussi des lieux de culture. Cependant, je regrette parfois le manque de solennité que cela peut générer. Nous sommes dans la maison de Dieu. Que nous soyons croyant au non, que nous soyons catholiques ou non, il me semble que nous devrions avoir cela à l’esprit. Nous ne sommes pas dans une salle de concert, nous sommes en présence de Dieu !
Pendant que je m’assois pour contempler l’édifice, un monsieur crie d’un bout à l’autre de l’église : « Il faut sortir maintenant ! ». En effet, un autre concert va avoir lieu à 19h… Visiblement, ils s’enchaînent ! Un monsieur est outré de la façon dont il se fait rabrouer quand il exprime son mécontentement en hurlant à l’organisateur qui ne cède pas : « Nous sommes dans une église ! Un peu de respect pour les croyants ! »…
Cette scène m’attriste car je sais que certains croyants, quelle que soit leur religion ont le sentiment de ne pas être respectés au nom de la laïcité… D’ailleurs, j’entends souvent des personnes rugir de colère parce qu’elles ne se sentent pas respectées pour des motifs très divers. Je m’interroge…. Est-ce une juste cause d’exprimer ma colère dans ce cas ? Ou est-ce de l’individualisme, de l’égocentrisme ? Dans tous les cas, ce sentiment d’irrespect pointe quelque chose de blessé en moi, en nous…
Mais, n’avons-nous pas chacune et chacun une blessure ?


Marie-Madeleine
Une relique de Marie-Madeleine est exposée sur cet autel. Je me recueille un instant et dépose une intention de prière dans un des paniers. Je suis certaine qu’elle intercèdera pour moi auprès de Jésus.
Marie-Madeleine, toi qui as suivi le Christ, toi qui étais au pied de la croix avec Marie et Jean, toi qui étais au tombeau… Toi qui as été la première à recevoir la révélation du Christ ressuscité… Exauce-moi !

La Bourse de Commerce
La Bourse de Commerce abrite la collection de François Pinault, homme d’affaires et milliardaire français, passionné d’art contemporain. En ce moment se tient une exposition intitulée « Corps et âmes ». À cette occasion, ce soir une conférence a lieu, donnée par Elvan Zabunyan, historienne de l’art et professeure à l’université Paris Panthéon-Sorbonne. J’assiste à la conférence sans avoir vu l’exposition car je suis curieuse de savoir ce qu’Elvan Zabunyan aura à dire de « Corps et âmes »…
Le thème de l’âme semble être en vogue en ce moment… En effet, au Grand Palais une autre exposition de Chiharu Shiota a lieu intitulée « Frémissements de l’âme ». Étant donné que je conduis un projet nommé « Histoires d’âmes », cela m’intéresse !




Body and Soul
Elvan Zabunyan a publié un livre intitulé « Body and Soul ». Au cours de la conférence, elle croise la recherche faite pour cet ouvrage avec la collection « Corps et âmes ».
Au départ, sa définition de l’âme illustrée par la citation de Roy Ayers me semblait intéressante. Cependant, au fil du discours de l’historienne de l’art, je m’interroge…
L’âme est-elle seulement la conscience qu’un individu a de lui ? Se déploie-t-elle seulement dans un contexte d’engagement politique ?
Vidéo de Marian Anderson
Dans cette première partie de sa conférence, Elvan Zabunyan explique le contexte dans lequel les œuvres présentées sur le diaporama, que j’ai prises en photo ou filmées se sont inscrites. Elle détaille notamment, l’intervention de Marian Anderson au Lincoln Memorial qui avait soulevé des oppositions en raison de sa couleur de peau.
Voici un extrait du concert qui a finalement eu lieu en 1939.

Signatures
Avant de partir, je prends en photo la conférencière pendant la séance de signature de son dernier livre. Je suis un peu perplexe…
D’abord, je me sens mal à l’aise face à la réponse qu’Elvan Zabunyana a faite à des personnes du public lui demandant d’expliquer la raison pour laquelle elle n’a pas voulu citer le nom d’un des artistes présentés sur le diaporama. Elle a répondu que c’était parce que cette personne avait commis des actes répréhensibles. Elle a poursuivi en disant : « Je ne cite pas non plus le nom du président des États-Unis actuel. ». Sur ce une dame est intervenue en pointant que le dernier artiste qu’elle avait présenté avait étranglé sa femme avant de se suicider. La conférencière a rétorqué : « Ce n’est pas sûr qu’il l’ait étranglée et de toute façon étant donné qu’il s’est suicidé après… ». Cette réponse a jeté un froid dans la salle. Que signifie-t-elle ?
D’autre part, à l’issue de la conférence il me semble que l’âme a été traitée exclusivement dans un contexte politique et matérialiste. L’âme permet une élévation à travers l’art que je n’ai pas perçue dans le propos de la conférencière… Mais ce n’était peut-être pas son propos, justement…
Metro Music !
Chaque fois que j’entends un musicien jouer dans le métro cela m’enchante. Quelle merveille d’entendre de la musique dans ses longs boyaux de béton ou les pas peuvent devenir mécaniques. Tout à coup, une petite âme circule parmi les passants. Elle apporte de la douceur et ouvre des horizons.
Ce soir, je prends le temps de filmer ce musicien. Je trouve intéressant d’observer cet homme statique devant lequel passe des gens qui vont quelque part. Je le vois comme une invitation à ralentir, à s’arrêter et entrer en communication avec ce qui nous émeut.
Merci Monsieur !
Jeudi 13 mars - Black & white
Aujourd’hui, la journée se décline en divers tons de gris au rythme des éclaircies et des passages pluvieux. Parfois, j’aime poser un filtre argenté sur les photos que je prends. L’atmosphère change immédiatement. Elle devient un peu plus austère mais aussi plus douce, peut-être… Quelque chose d’intemporel se glisse avec le noir et blanc.
Ces clichés ont-ils été pris il y a trente ans ou aujourd’hui ?… J’aime cette promenade imaginaire dans le temps que propose le noir et blanc sur certains sujets. Je trouve rassurant de me dire que ce que je photographie aujourd’hui n’a pas changé. Cela induit une forme de stabilité qui m’apporte un certain réconfort.
Paris sera toujours Paris !
École des Mots
À 15h, j’ai rendez-vous pour un atelier d’écriture rue Dante, en face de Notre-Dame. Je suis heureuse de retrouver ce quartier dans lequel j’aime bien me promener.
J’ai découvert cette école par hasard. En passant, mon attention a été attirée par cette phrase de Marguerite Duras inscrite sur la devanture : « Écrire c’est aussi ne pas parler. C’est se taire. C’est hurler sans bruit ».
J’avais aimé cette idée de silence dans l’écriture… Il me semble que les mots justes émergent de la profondeur du silence.
Charlotte Milandri, l’animatrice de l’atelier nous propose cinq exercices. Le dernier d’entre eux m’a beaucoup plu. En cinq minutes, nous devions répondre à la question : « Pourquoi j’écris ?». Il m’a semblé que nous étions au cœur de quelque chose… À cet endroit qui me permettrait de dire l’essentiel. À ce moment-là, j’ai senti que j’entrais en écriture. Voici le texte que j’ai écrit :
« Pour vivre.
Respirer.
Exister.
Trouver ma place dans ce monde.
Sortir du silence.
Faire entendre ma voix.
Entendre ma voix.
Me métamorphoser. »

L’Église Saint Julien le Pauvre
Vers 18 heures, en sortant de l’atelier d’écriture, j’ai besoin de marcher. Nous avons pas mal écrit et Charlotte nous a donné de nombreuses explications liées aux processus d’écriture. J’ai besoin de m’aérer la tête !
J’aime me laisser guider par mes pas… Souvent, ils savent mieux que ma tête où aller ! je me dirige vers saint-Germain-des-Prés lorsque j'aperçois une petite église, d’apparence très modeste. Je rentre… quel émerveillement ! Quelle bénédiction d’avoir trouvé cet endroit en plein Paris ! Ici, nulle agitation… Il n’y a que moi et une dame profondément recueillie. Je respire…
En voyant les nombreuses icônes accrochées aux murs, je suppose que cette église est orthodoxe. Puis, je lis un panneau sur lequel est écrit : « Paroisse grecque melkite catholique ». J’ignore ce que signifie melkite et je cherche la définition… Je lis : « Catholique de rite byzantin »… Formidable ! La variété du monde chrétien m’étonnera toujours ! Je découvre sans cesse des familles différentes et cette diversité m’enchante ! Cette église me plaît. Je me sens bien. Je m’assois un instant pour me recueillir.
Merci, Seigneur de nous avoir fait à la fois semblables et différents !

Sunset
En sortant de l’église, j’ai encore besoin de marcher. Un vent glacial souffle par bourrasques mais le spectacle du crépuscule qui se déroule sous mes yeux me fait oublier le froid.
Je longe la Seine du Pont Saint-Michel au Quai d’Orsay. Je fais une halte dans un charmant café pour me réchauffer avec un chocolat et je repars jusqu’au Grand Palais pour prendre le métro 9 à la station Franklin Roosevelt.
La nuit est tombée et mes yeux vibrent encore des couleurs irréelles de la fin du jour. Je repense à cette phrase entendue au passage… Une jeune fille disait à sa copine : « Des crépuscules à Paris, j’en ai vu ! Mais des comme ça, jamais ! ».
Merci, le ciel de nous combler de tant de merveilles !



At home…
J’arrive au studio vers 21h. Je pose mes affaires et m’assois quelques instants sur la terrasse pour contempler ma grande amie qui a aujourd’hui une invitée dans le ciel… Mme la pleine lune !
Emmitouflée dans ma veste, j’écoute les rumeurs lointaines de la ville et admire les reines de la nuit en silence… Je me sens si bien sur les toits de Paris ! En effet, la petite terrasse attenante au studio que je loue surplombe le toit d’en dessous… J’aime être en hauteur… J’ai l’impression de voler !
Good night !



Vendredi 14 mars - Le Grand Palais Immersif
Ce matin, je prends le métro direction Bastille pour découvrir le Grand Palais Immersif où a lieu une exposition de Miguel Chevalier intitulée « Pixel ». Cet artiste de l’art numérique et virtuel est né au Mexique en 1959. Il a grandi dans un environnement culturel et artistique stimulant qui l’amène à découvrir des peintres muralistes tels que Diego Rivera mais aussi le réalisateur Luis Bunuel ou l’architecte Luis Barragan. L’influence mexicaine apparaît dans son travail notamment dans l’emploi de couleurs vives, dans la dimension monumentale de ses oeuvres et dans l’intégration de son art à l’espace public. Tout au long de l’exposition Pixel, le visiteur est accompagné par un fond sonore crée par Thomas Roussel qui déconstruit les schémas classiques de la musique auquel il mêle la musique électronique.
J’ai aimé cette exposition qui utilise les moyens technologiques de notre époque pour en faire de l’art. Cette prise directe avec le présent est intéressante car elle met en scène ce que l’on ne voit peut-être pas puisque faisant partie de notre quotidien. Une fois de plus, je suis ravie de constater que le regard des artistes permet de glisser de la poésie, de l’esthétique et de la fantaisie où il n’y en a pas à première vue. Le fond sonore de Thomas Roussel m’a fait voyager dans cette immersion pixelisée.
À la fin de la visite, je me suis promenée dans les tableaux interactifs où j’ai éprouvé une légère oppression. Je me sentais un peu désorientée. Je me suis assise un instant sur un banc… Puis, je suis sortie. Dans la rue, j’ai été heureuse de retrouver les voitures, les passants, les bruits des klaxons et des moteurs… En somme, un environnement familier ! J’avais l’impression d’avoir voyagé dans un ordinateur et de retourner à la vie réelle…
Mais qu’est-ce que la réalité ?
Vidéos
Le travail de Miguel Chevalier propose des formes mouvantes qu’il est intéressant de filmer. Vous trouverez ci-dessous quelques vidéos. Pour les visionner, il suffit de cliquer dessus… Bon voyage dans un monde en pixels haut en couleurs !
Vendredi 14 mars - Grand Palais
Au Grand Palais à 21h, un concert est donné par Keiichiro Shibuya pour la clôture de l’exposition de Chiharu Shiota intitulée « The Soul Trembles ».
Mirror Ghost
Keiichiro Shibuya est un compositeur et musicien japonais qui vit entre Tokyo et Paris.
Le concert qu’il propose, Mirror Ghost, est une expérience immersive faite de projections de phrases sur des tissus légers suspendus au plafond, de fumée et de jeux de lumières. Cette programmation visuelle créé une ambiance spectrale et immatérielle. Le public est debout et peut déambuler dans l’espace.
J’ai apprécié l’univers de Keiichiro Shibuya que je découvrais complètement. Avant le début du concert, les phrases projetées étaient accompagnées d’une voix off. J’ai été attentive aux messages qu’elles délivraient tout au long du spectacle. J’en retiens trois thèmes : le chaos du monde actuel, l’espoir, le silence et le lien entre les humains. Les phrases sont en osmose avec la musique, tel un opéra muet…. Elles apportent de l’humanité dans l’univers fragile et incertain que propose Keiichiro Shibuya.
Bravo !
The Soul Trembles
Après le concert, les portes de l’exposition de The Soul Trembles s’ouvrent… J’emporte les dernières notes de musique de Mirror Ghost… Et je me dis que dans la vision d’un monde chaotique que propose Keiichiro Shibuya, l’âme sauve, ancre et donne une direction. C’est ce que je sens dans ma vie présente, ce qui n’était pas le cas pendant une partie de mon existence. L’expérience me permet de comparer… Aujourd’hui, il me semble que quel que soit le chaos du monde passé, présent et avenir, Dieu est là. Il est le point qui ne bouge pas. Cela est vrai pour toutes les religions.
Je crois qu’il est vital dans la vie de certaines personnes de cesser de ne pas choisir, d’hésiter, de tergiverser et de ne pas savoir… Faire un choix implique la possibilité d’être attaqué, méprisé ou incompris par ceux qui ont une vision différente. Mais c’est aussi l’occasion de se parler, d’échanger, de croiser les points de vue. Le choix que je fais ne me donne pas raison. Il n’est pas meilleur que les choix des autres. Il correspond à ce dont j’ai besoin pour vivre.
Mais encore faut-il savoir ce dont on a besoin…
What is the soul ?
L’exposition de Chiharu Shiota me semble plus proche de ma conception de l’âme celle que nous proposait Elvan Zabunyan lors de sa conférence « Body and Soul ».
Ici, je pourrai définir la conception de l’âme par ce qui est profondément ancré en nous. Cependant, à mes yeux, il manque cet envol, cette ouverture que me font ressentir l’outre-noir de Soulage ou les vitraux de la Sainte Chapelle.
Ici, je m’élève un peu mais je reste quand même rivée au sol. Je ne suis pas en contact avec cette expansion intérieure infinie que j’affectionne et recherche chaque jour. Je pense que cela est dû à une absence… En effet, les fils de Chiharu relient les personnes et les choses entre elles sur un plan horizontal.
Il me manque la verticalité, l’accès direct au ciel, à l’univers, au grand tout… À Bouddha, Allah, Yavhé ou l’Esprit de la Montagne selon les croyances de chacun… Il me manque « plus grand que moi »… Et cela me surprend car The Soul Trembles ou Body and Soul parlent d’âme en se maintenant dans la matérialité, dans l’incarnation, dans la référence historique individuelle ou collective…
Notre époque aurait-elle peur de s’élever vers des hauteurs inconnues et incommensurables ?
Samedi 15 mars - Le Cirque d’Hiver
Il y a bien longtemps que je ne suis pas allée dans un cirque… Aujourd’hui au Cirque d’Hiver se déroule un spectacle un peu particulier car il a pour thème la vie de Mozart et sa musique. Bien sûr, l’univers du cirque amène une touche de fantaisie dans le sérieux de la musique classique… Mais celle de Mozart a déjà quelque chose d’enfantin et de malicieux !
Je suis assise au premier rang à côté d’un vieux monsieur accompagné de sa fille, qui doit avoir à peu mon âge, et de son épouse. Qui a dit que le cirque n’est fait que pour les enfants ? Pour ma part, je suis ravie de découvrir le plus ancien du monde, inauguré en 1852 par Napoléon III. Je suis épatée !
La Défense
Après le spectacle, je me rends dans un Apple Store de La Défense. J’y passe deux heures pour tenter de réparer iMovie. Je suis bien embêtée car j’avais préparé une vidéo pour la présentation de l’exposition d’Histoires d’âmes qui ne fonctionne pas… D’ailleurs, toutes celles que j’avais créées sont bloquées…
Quand je sors, il fait nuit et je découvre La Défense by night… Ambiance américaine !




Dimanche 16 mars - Musée du Quai Branly
C’est avec joie que je descends du bus 63 à quelques pas du Musée du Quai Branly pour visiter l’exposition « Au fil de l’Or ».
Celle-ci s’articule autour des pièces majeures de Guo Pei, une créatrice de mode chinoise. Après Dolce & Gabbana, la mode est à nouveau sur le devant de la scène… J’avais beaucoup aimé « Du Cœur à la Main » mais avec Guo Pei une rencontre a lieu… Ses créations donnent à voir une autre dimension… En cheminant dans l’univers lumineux de l’artiste, je comprends… Dans une vidéo, elle explique qu’au cours de la visite d’une église, elle a senti quelque chose d’immense, une lumière qui n’était pas commune… Guo Pei avait perçu l’amour. Par la suite, elle n’avait eu de cesse de retranscrire à travers ses créations ce qu’elle avait perçu pour que les gens voient cet amour…
À ma manière, c’est ce que je fais… J’ai vu et je témoigne. Il est impossible de faire autrement quand on a vu, comme le disait Guo Pei dans la vidéo…
Cependant, un point me laisse interrogative… De tout temps, le vêtement est l’expression d’une époque… Mais la nôtre semble être très attachée à ce moyen d’expression artistique… Pourquoi ?




Concert à la Sainte Chapelle
Cette semaine s’ouvre et se ferme avec la Sainte Chapelle. Lundi, lors de ma visite, j’ai vu une affiche présentant une série de concerts classiques ayant lieu dans cet endroit. Subjuguée par la beauté du lieu, je n’avais qu’une hâte… Y revenir !
Je m’assois à l’arrière de la chapelle afin de pourvoir contempler en musique ces vitraux qui emportent mon âme vers le ciel ! C’est un accès direct, sans escale ! Je suis comblée ! L’ensemble Paris Classik ouvre le concert avec la Canon de Pachelbel… Immédiatement, des larmes me viennent… Dieu est là… Et je lui parle… Dans des moments comme celui-ci, il me répond… Il me répond toujours mais je ne suis pas toujours en mesure de l’entendre… Dans des moments comme celui-ci, mon cœur, mon âme, toutes les cellules de mon corps, tout mon être est ouvert… Je t’écoute, Seigneur…
Mes yeux s’accrochent aux vertigineux vitraux et je sais… J’ai compris ce qu’il fallait comprendre… J’ai vu ce qu’il fallait voir… Tout m’a été révélé… Mais quoi donc ? Qu’est-ce qui m’a été révélé ? Qu’est-ce que j’ai vu ou compris ? Je ne saurais le dire avec des mots… C’est là, dans mon cœur… Mon âme sait… Elle me guide.
Amen.






